au jour aussi, le charbon tuait
par kiki le, 06/10/2007Au jour aussi, le charbon tuait
De tout temps et même sous l’occupant, les grèves de mineurs retentirent fortement sur la vie et l’opinion publique. En mars 1963, pourtant, un mouvement va étonner le pays par son ampleur et son contexte : voilà qu’après avoir adulé le mineur, qui a relevé la France, on commence à lui faire entendre qu’on aura de moins en moins besoin de lui ! il ne comprend pas ce retournement que lui infligent des lois économiques nouvelles. Le mouvement est dur et long, et l’inconcevable arrive : des mineurs n’ont plus de quoi se chauffer alors que le rude hiver se prolonge.
A Libercourt, depuis quelques temps, des pelleteuses prennent le terril de la fosse 5 pour en faire l’assise de la future autoroute Lille-Dunkerque. Au fur et à mesure du creusement, des couches anciennes apparaissent, qui contiennent encore pas mal de charbon. En principe, cela est interdit mais, vue la crise, on ferme les yeux et de nombreuses familles grévistes en sont réduites à pratiquer le grapillage appris pendant la guerre, pour ramener à la maison quelques sceaux d’anthracite, destiné à la cuisinière ou au feu « flamand ».
Le 3 avril 1963, ils sont une douzaine sur une couche fraîchement découverte. Certains, pour être les premiers à se servir, n’hésitent pas à escalader haut, malgré les coups d’avertisseurs des conducteurs des engins. A 17h, avertissement : un premier glissement ensevelit un homme à mi-jambes mais on le tire de là rapidement. Dix minutes plus tard, une « avalanche noire », de plusieurs milliers de mètres cubes dévale sans prévenir et recouvre, les écrasant, une femme de 66 ans et un garçon de 13 ans à qui ses parents avaient interdit d’être là. Travaillant sous le danger direct, les sauveteurs, des mineurs qui connaissent les traîtrises du schiste, les dégagent mais il est trop tard pour eux. En revanche, un jeune mineur de 18 ans, de la Cité du bois tout proche, aura plus de chance.
La voix du nord 22 Dec 1990.