catastrophe de Fouquières lez Lens 4 février 1970 (2)
par bourdonb le, 03/02/2008Les organisations syndicales appellent les mineurs du Bassin à faire une grève générale de 24 heures la veille des funérailles. Les communiqués des quatre centrales tendent notamment à attirer l'attention sur la sécurité dans les mines exigence du plein respect de la sécurité du travail (C.G.T..), renforcement et mise en application de toutes les mesures de sécurité (C.F.T.C..), mise en place des règles accrues de sécurité (F.0.), exigence de l'amélioration des conditions de sécurité (C.F.D.T..).
Y aurait-il eu catastrophe au 6 de Fouquières-lez-Lens ? Y aurait-il eu 16 mineurs tués ? Si .. .
- Le creusement du traçage s'effectue sur trois postes et le changement du ventilateur est fait dans un interposte alors qu'il y a mouvement de personnel. Jadis, les postes du matin et de l'après-midi étaient consacrés à la production, le poste de nuit à l'entretien ... Le changement de ventilateur ne pouvait-il pas être effectué un jour de la semaine où la mine sommeille (dimanche ou journée de repos) ? .. .
- Le siège est grisouteux. Le ventilateur étant arrêté, le grisou va s'accumuler. Y avait-il possibilité d'aménager un système d'aérage secondaire ? Et si la fosse avait été équipée de télé grisoumètres ? ...
- Pour évacuer le grisou du traçage, et éviter son accumulation dans un autre endroit, on fait fonctionner le ventilateur par à-coups afin de le diluer avec l'air : une opération qui dure environ deux heures. L'équipe de traçage est sur place pourquoi ? ...
- On connaît le chemin que va prendre le grisou : il va entrer dans la bowette empruntée par des mineurs du poste du matin qui se rendent à la taille 48 et qui traversent ainsi une zone dangereuse. Ne pouvait-on les envoyer travailler ailleurs ? Jadis n'y avait-il pas des tailles de « réserve » ? ...
Une inconnue subsiste : comment s'est produite l'étincelle qui a provoqué le coup de grisou ?
En 1983, il n'y aura plus d'extraction charbonnière, a annoncé récemment le directeur général des H.B.N.P.C. Le gisement minier du Nord de la France s'épuise, l'extraction devient de plus en plus difficile. Les Houillères ont besoin de subventions pour équilibrer leur budget. Cela coûte au contribuable. Par rapport aux autres sources d'énergie, le charbon devient de moins en moins compétitif ; le pétrole et le gaz naturel reviennent moins chers.
Par ailleurs, les Houillères n'embauchent plus ; et quand bien même elles embaucheraient, il apparaît plus possible de se faire une « demi-pension » dans les mines. Alors les jeunes quittent la région minière.
« La réduction des effectifs, l'aggravation des conditions de vie et de travail, la recherche d'une productivité toujours plus élevée, conduisent, à tous les niveaux de l'entreprise, à développer les conditions mêmes de l'insécurité du travail » souligne la C.G.T.. dans un communiqué.
De son côté, la C.F.D.T. soutient que « dans le domaine de la sécurité, le progrès technique doit s'affirmer avec autant de vigueur que dans la recherche des impératifs de productivité ».
Depuis le 23 janvier 1969, dans le monde, 17 catastrophes minières ou accidents collectifs connus, près de 400 mineurs morts dans la mine. La C.F.D.T. constate « que la mine de 1970 tue dans les mêmes conditions qu'il y a 50 ans. La fatalité ne peut tout expliquer ».
La femme du mineur : comment réagit-elle?
Lorsque son mari part au travail, elle ne sait si elle le reverra vivant. Elle est un peu comme la femme d'un marin. Mais, comme l'a dit à sa femme, cet électromécanicien qui, près de son poste de transformateur, a vu et vécu la catastrophe « Je continuerai à descendre. J'y penserai à ce 4 février ; mais, quoi, il faut bien faire son métier. Ce n'est pas le tout d'avoir peur ».
Si la plupart des mineurs ont la mine dans le sang, il faut ajouter qu'ils en sont quasiment prisonniers par les avantages inhérents à la profession : logement et soins médicaux gratuits notamment. Aussi, ne faut-il pas s'étonner que, malgré le caractère dangereux de leur métier, ils reprennent pratiquement tous le chemin de la mine après les funérailles de leurs camarades.


