le tortillard Lens-Frévent
par Ch'Klote le, 25/02/2008Le petit train Lens-Frévent n'avait rien à voir avec celui des Mines de Lens reliant Lens Ste Elisabeth à Violaines
Appartenant à la Société des Chemins de Fer Economiques du Nord, la ligne Lens-Frévent (54 km) a été ouverte le 8 août 1890. Ses rails avaient un écartement d'un mètre. Il desservait entre autres les gares de Liévin, Souchez, Aubigny en Artois, Liencourt, Rebreuviette et Frévent.
Ce petit train, surnommé par tous "Le Tortillard", transportait de nombreux voyageurs mais aussi des marchandises, en particulier du charbon. le parcours entre Lens et Frévent pouvait durer plus de 3 heures. Le train peinait pour monter les côtes. Si bien que l'on pouvait le prendre en marche. Les pannes et déraillements étaient fréquents.
A l'âge d'or de la ligne, on ne compte plus le nombre de petits cafés installés dans les villages. Ce train a beaucoup contribué à l'essor économique du territoire.
Ce train est indirectement à l'origine du nom du pont "Césarine" à Lens. C'est en effet à l'emplacement de ce pont où se trouvait au début du XXème siècle un passage à niveau et un arrêt qu'un estaminet très populaire était tenu par une dénommée Césarine Hennebois. Celle ci donna donc son prénom au pont lors de sa construction qui a du avoir lieu après la première Guerre Mondiale.
Pendant la seconde guerre mondiale, l'exploitation a pu continuer tant bien que mal : la ligne servit d'abord à évacuer la population qui fuyait les Allemands pendant "l'exode". Les habitants subissant les restrictions de l'occupant, la ligne devient rapidement l'outil principal de l'organisation du marché noir. Toutes les cachettes furent utilisées :la doublure de la veste du conducteur, le plancher des wagons et même la réserve de charbon.
Mais après la fin de la guerre, la ligne devint de moins en moins rentable : le déficit d'exploitation s'alourdit et contraint le Tortillard à effectuer son dernier voyage le 31 mai 1948.
Le p'tit train lui-même est l'objet de plaisanterie ; on se raconte encore la farce, peut-être légendaire, qu'on lui a jouée au carrefour de l'Arrêt de Bully à Liévin.
Un jour, alors que le mécanicien, chauffeur et contrôleur se rafraîchissaient à l'estaminet, quatre plaisantins détachèrent le dernier wagon du convoi. Le tortillard partit, inconscient de la plaisanterie, et l'on ne se rendit compte de la situation anormale que quelques hectomètres plus loin. Le convoi fît marche arrière et l'on retrouva, dans le wagon immobile, un vénérable vieillard rouge de colère qui frappait violemment le plancher de sa grosse canne.
Je voudrais remercier Ch'Klote pour son article sur le train à voie étroite . Je n'avais que 4 ou 5 ans quand je l'ai emprunté avec ma mère pour aller à Bouquemaison et mes souvenirs étaient vagues.
Il n'y avait pas que le conducteur qui a servi pour faire le marché noir. Les voyageuses avaient des espèces de poches en tissus qu'elles se mettaient autour des seins ou faisaient pendre entre les jambes et dans lesquelles étaient glissés des morceaux de lard ou du beurre, voire du fromage. Le jour ou le train fut arrêté par les autorités, ma mère me mit deux morceaux de beurre dans mes pantalons "golfe" pour éviter la confiscation. Ce sont des souvenirs qui sont restés gravés par la trouille.
( 2 photos)