Berck 1956 - Chateaux de sable
par Ryckelynck Alain le, 04/08/2006A marée basse, la plage de Berck offre une immensité unie.
Un journal, "Le Figaro" peut-être, y organise l'été des concours de sable. Des cordes tendues délimitent un vaste terrain. A l'intérieur les concurrents s'en partagent les parcelles de deux mètres de coté; à l'extérieur, le public encourage ses poulains.
J'ai remporté au concours du dimanche précèdent le cinquième prix: une boite de peintures à l'eau, en forme de palette, en modelant une caravelle. Non, pas la Santa Maria… La Caravelle!, la vraie, celle que j'ai vue avec quelques privilégiés évoluer depuis déjà un an dans le ciel de Villebon, et dont la silhouette enflamme autant le cœur des français que celle de B.B.
Et je n'ai aucun mérite, à mon âge, à avoir préféré la première à la seconde…
Ce dimanche-ci, je ne concoure pas, mais en ma qualité de vétéran, je me permets de passer sous la corde pour observer de plus près le travail des "nouveaux". Dans le public bon-enfant, personne ne prête attention à ma transgression, sauf un bonhomme à moustache :
- Eh! le petit, là, il n'a pas le droit!
Papa est justement à coté de lui et, assez fort pour que tout le monde en profite:
- Comment ? il n'a pas le droit ?
- Non! c'est interdit de passer sous la corde!
- Vous avez raison monsieur !
Il enjambe lui-même la frontière, s'empare de moi comme d'un sac, me glisse à l'oreille très vite:
- ne t'inquiète pas, je vais faire semblant !
et m'envoie une grande claque de théâtre, très bien imitée, en m'entraînant hors du terrain.
Par une magie que Papa avait devinée, ça n'est pas à lui mais à la moustache que vont les ‹‹ hou! hou! ›› du public. Le pauvre type est piteusement expulsé, tandis que Papa et moi, on va manger une glace.
( Il y a à Berck encore aujourd'hui deux excellents marchands de glaces: "Le Cornet d'Amour", qui cuit ses propres cornets, et "l'Alaska" dont les glaces seraient paraît-il encore meilleures, mais aux cornets industriels : cruel dilemme!)